Face à l’explosion du nombre de locations meublées, l’arsenal législatif se déploie. Lundi 28 octobre, le texte final de la proposition de loi visant à réguler les locations touristiques, a été adopté en commission mixte paritaire. Les maires vont aussi avoir à disposition de nouveaux outils législatifs. La loi pourrait être appliquée dès janvier, selon la députée Annaïck Le Meur (Renaissance-Finistère).
Face à un développement devenu incontrôlable des locations touristiques, passées de 300 000 en 2016 à 1,2 million aujourd’hui, une proposition de loi validée en commission mixte paritaire, lundi 28 octobre vise à encadrer les meublés de tourisme en France « pour répondre aux attentes des territoires confrontés à la pénurie de logements et aux tensions sur le marché locatif ».
Quelles sont les principales mesures ?
Ce texte prévoit des outils à la portée des maires pour leur donner les moyens de limiter l’essor des logements de tourisme. Ainsi, les communes comptant plus de 20 % de résidences secondaires pourront, à travers une modification simplifiée de leur Plan local d’urbanisme réserver des zones exclusivement à la construction de résidences principales. « C’est une mesure très attendue par les maires. Elle va pouvoir ramener de la vie dans les villages », se réjouit la députée finistérienne Annaïck Le Meur (Renaissance), co-autrice de la proposition de loi.
Tous les meublés de tourisme devront être enregistrés dans leur commune, comme c’est déjà le cas dans certaines villes. Le principe est généralisé. Cela permettra aux communes d’instaurer un quota de ce type de location permettant un meilleur contrôle de l’usage des logements. Aujourd’hui, la loi le prévoit pour les zones dites tendues (les communes de plus de 200 000 habitants notamment).
Les communes pourront aussi abaisser le nombre maximal de jours de locations touristiques des résidences principales de 120 jours à 90.
LIRE AUSSI : « Une réponse concrète à la crise du logement » : cette loi applaudie face au phénomène Airbnb
Quel changement pour le DPE ?
Les meublés de tourisme n’en seront plus exemptés. Certains propriétaires avec des biens mal isolés étaient tentés de les basculer en location courte durée. Le texte prévoit « une généralisation de l’obligation du diagnostic de performance énergétique pour la location de courte durée ». Lorsque la loi entrera en vigueur, impossible de louer les locations touristiques classées E. Les autres meublés de tourisme « ont dix ans pour effectuer les travaux de rénovation énergétique », ajoute la députée.
Et sur la fiscalité des meublés touristiques ?
Les avantages fiscaux des meublés touristiques, types Airbnb, sont revus à la baisse. Le texte vise à aligner la fiscalité des locations touristiques sur celles des locations classiques.
Aujourd’hui, il est plus avantageux fiscalement de louer un bien meublé de tourisme classé, ou un bien meublé de tourisme classique type Airbnb. Puisque des abattements, respectivement de 71 % et de 50 %, sont prévus par la loi. Alors qu’un propriétaire d’un bien loué non meublé bénéficie uniquement d’un abattement de 30 %. L’abattement signifie que les dépenses engagées pour le logement peuvent être déduites des loyers perçus. Donc s’il diminue, la part des revenus locatifs sur laquelle vous êtes imposés augmentent.
La proposition de loi vise à « réorienter le cadre fiscal et réglementaire applicable aux locations saisonnières et de longue durée », précise Annaick le Meur. En clair à abaisser le niveau d’abattement de 71 % à 50 % pour les meublés de tourisme classés, et de 50 à 30 % pour les locations meublées.
Quels effets peuvent avoir ces mesures fiscales ?
Selon les chiffres de l’administration fiscale, relayés dans le rapport sur la fiscalité locative, 70 % des loueurs de meublés non professionnels bénéficient du régime réel, qui permet aux bénéficiaires d’amoindrir leur imposition sur leurs revenus locatifs.
Les autres optent pour le régime micro-bic. « La loi ne pénalisera pas les gros loueurs mais plutôt les petits qui étaient au régime micro-bic et déclaraient leurs revenus sans comptable », observe Vital Saint-Marc, associé du réseau d’audit et de conseil RSM et président du club fiscal de l’ordre des experts-comptables d’Île-de-France.
Conséquence, le texte « va avoir un effet sur le montant d’impôt payé par les propriétaires qui déclarent leur revenu locatif au micro-bic, mais les effets pour réorienter le marché seront limités, estime Antoine Simon, expert-comptable à Nantes au sein du cabinet Advelia. Peu de propriétaires sont au régime micro-bic. Si la location d’un bien en longue durée (meublé ou nu) était plus avantageuse, cela inciterait des propriétaires à basculer d’une location courte durée à longue durée ».
Le texte peut-il aller plus loin ?
Le Sénat a fermement refusé de baisser davantage le taux d’abattement des meublés de tourisme classés, même s’il était jugé trop généreux par les co-auteurs du texte. Dans le cadre d’un autre texte, celui du Projet de loi de finances 2025, deux mesures pourraient vraiment tordre le cou aux locations de courte durée. L’une prévoit d’accroître la taxation de la plus-value, lors de la revente, pour la location meublée non professionnelle. Et l’autre mesure concernerait l’augmentation de l’amortissement pour les locations nues de 30 à 50 %.
Cette loi a-t-elle des chances d’aboutir ?
Oui et même rapidement. Depuis plus d’un an, les discussions étaient engagées. « Le texte a connu plein d’aléas. Il a aussi subi un 49.3 avec une erreur technique », se souvient Annaïck Le Meur. L’Assemblée avait finalement voté en très large majorité en janvier 2024 cette proposition de loi qu’elle portait avec la députée Inaki Echaniz (Parti socialiste, Pyrénées-Atlantiques). Le Sénat l’avait aussi adoptée à la quasi-unanimité. Mais la dissolution a coupé sa progression sur le chemin parlementaire.
Au regard des enjeux importants dans le contexte de la crise du logement, une commission mixte paritaire s’est réunie lundi 28 octobre pour trouver un compromis entre les souhaits du Sénat et de l’Assemblée nationale. La nouvelle proposition de loi sera présentée le 5 novembre au Sénat et le 7, à l’Assemblée nationale. « L’entrée en vigueur se fera dès la publication du texte, en étant optimiste cela peut être dès janvier 2025 », se réjouit la députée.
2024-10-29T17:36:47Z dg43tfdfdgfd